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Le Pays de Cocagne

Le Pastel

"Isatis tinctoria" ! C'est cette plante aux fleurs jaunes, proche du colza actuel, qui a fait la richesse (aux XVème et XVIème siècles) de toute la région que nous allons maintenant découvrir... En fait, ce sont ses feuilles que l'on utilisait pour obtenir une teinture bleue : le pastel.

Elles étaient broyées et égouttées, et la pâte obtenue moulée en boules, les coques (d'où le nom de pays de Cocagne !...). Séchées pour favoriser leur fermentation, encore une fois broyées puis humidifiées, et à nouveau séchées : les coques deviennent en 6 mois de l'agranat, prêt à teindre.

L'indigo, arrivé du Moyen-Orient et beaucoup moins cher, allait mettre à mal la culture du pastel qui avait créé une richesse phénoménale dans le triangle Toulouse - Carcassonne - Albi !...

Lavaur, ville cathare

Lavaur (10 239 habitants), au coeur du pays de Cocagne, siège d'un des 3 évéchés qui servirait à construire le département, connut l'épisode le plus sanglant de l'histoire cathare ! La ville, acquise aux hérétiques, fut assiégée au printemps 1211 par les troupes de Simon de Monfort. Après 2 mois de rudes combats, un véritable massacre eut lieu...

Monfort fit pendre puis égorger les 80 chevaliers qui défendaient la ville ; Dame Guiraude, seigneur du fief, fut jetée vivante au fond d'un puits puis lapidée ; 400 hérétiques furent brûlés vifs sur un immense bûcher ! Comme à Albi, la victoire de l'église se concrétisa par la construction d'une cathédrale à l'allure de forteresse...

Lavaur : la cathédrale

Dominant l'Agout, la cathédrale Saint-Alain fut construite en briques dans le style gothique méridional sur l'emplacement d'un ancien prieuré roman. Ce vaste édifice (23 m de hauteur de voûte) conserve le seul exemplaire de Jacquemart encore en fonctionnement dans le sud-ouest.

A ses pieds, les jardins de l'évêché réalisés dans le style "à l'anglaise" abritent des cèdres centenaires ainsi qu'une statue de Las Cases, mémorialiste de Napoléon né dans les environs.

Le Lauragais

Tout ce secteur de la frange sud-ouest du département appartient au Lauragais, région agricole qui se prolonge dans la Haute-Garonne et l'Aude. Cette zone a connu sa première période de prospérité grâce à la culture du pastel. Plus tard, au XVIIIème s, c'est la culture du maïs (récemment importé d'Amérique) qui occasionnera une nouvelle croissance économique grâce à ses bons rendements.

La proximité du Canal du Midi favorisa l'exportation d'une autre céréale abondamment cultivée sur ces terres, le blé. On disait d'ailleurs jadis que le Lauragais constituait le "grenier à blé" de Toulouse ! Actuellement, ces collines molassiques et plaines alluviales portent en plus tournesol, sorgho ou colza...

Labos Fabre

Après le déclin des industries traditionnelles liées au charbon, à l'acier, au cuir ou au textile, le Tarn a dû réaliser une reconversion technologique, dont les laboratoires Fabre sont le fleuron. Pierre Fabre, pharmacien d'officine à Castres, monta son premier labo en 1961...

Actuellement, les "Labos" emploient près de 10 000 salariés répartis dans le monde entier : médicaments, dermo-cosmétique, homéopathie. Dans le Tarn, Castres abrite la direction générale et financière du groupe et des unités de production (2500 collaborateurs) sont dispersées sur l'ensemble du département : Soual, Mazamet, Lavaur, Gaillac, Castres...

Giroussens

En descendant l'Agout, voici le village de Giroussens (1040 habitants) construit sur un promontoire surplombant la rivière. Dans cette ancienne bastide du XIIIème s, l'église gothique Saint-Salvi (XVème s) et une échauguette en briques dominent la plaine du Vaurais.

Ce "village de caractère" est également connu pour ses poteries (XVIème - XIXème s) : une cinquantaine de potiers y résidaient alors, chauffant leurs fours avec le bois de la grande forêt voisine. Une maison de la céramique contemporaine et un marché annuel des potiers rendent hommage à cette ancienne production de terre vernissée...

Le Train de Saint Lieux

Au bas de Giroussens, d'anciens cheminots bénévoles ont réhabilité la gare de Saint-Lieux les Lavaur, et remis en ordre de marche d'anciennes locomotives. Le "chemin de fer touristique du Tarn" propose ainsi à la belle saison de parcourir quelques kilomètres de campagne locale.

Un quintal et demi de charbon dans le foyer, et la vieille loco Decauville s'ébranle ! Franchi le viaduc sur l'Agout, longé le bois de Garrigole, le convoi s'arrête au milieu des champs de maïs : il faut recharger en eau et charbon. Ainsi, plus de 10 000 passagers annuels atteignent le Jardin des Martels, terme de la voie...

Le Jardin Martels

Né à la suite d'une participation au concours de fermes fleuries dans les années 80, ce jardin ouvre ses portes au public de façon confidentielle en 1994. D'année en année de nouvelles réalisations voient le jour pour arriver au parc floral actuel qui accueille près de 50 000 visiteurs sur l'année.

S'étendant sur 35 000 mètres-carrés, il propose plusieurs espaces : canal bordé de massifs multicolores, jardin des 4 saisons (plantes originaires des 5 continents), bassin aux nénuphars, serre exotique, mini-ferme, belvédères,... Une belle étape fraîcheur entre plans d'eau et parterres colorés par plus de 2500 variétés de plantes...

Peyrole : la poterie

On a vu l'importance de la brique dans notre région, et si de nombreuses briquèteries industrielles pourvoyaient les constructeurs, il en existait de plus artisanales telle la poterie Camboulives à Peyrole, plus que centenaire, et aujourd'hui en partie détruite.

Ici deux personnes seulement assuraient l'ensemble de la production : récupération de l'argile dans la carrière voisine et préparation, façonnage des briques "à la main", séchage puis cuisson. Dans le four rempli "à la gorge" et chauffé au charbon, la cuisson (nécessitant une surveillance permanente) durait plusieurs jours. Au final, de beaux produits artisanaux pour retaper les fermes des environs...

Puylaurens

Au coeur du Lauragais tarnais, la ville de "Puèg Laurenç" (2891 habitants) occupe le sommet d'une colline lui permettant de dominer une vaste plaine agricole, dont les cultivateurs se retrouvent tous les mercredis (depuis le XIIème siècle) au célèbre marché de la ville.

Mais ce qui fait la célébrité de la localité, c'est un cordonnier-poète, Guillaume Lavabre, qui en 1792 baptisa la république du prénom de Marianne, très répandu en Occitanie. C'est ainsi que Puylaurens est devenu le "berceau occitan de la Marianne républicaine"...

Lautrec

Entre les vallées de l'Agout et du Dadou, Lautrec (1554 habitants) étale ses maisons sur un éperon rocheux dominé par le calvaire de la Salette. Ce site défensif idéalement situé entre Albi et Castres permit à la cité de se développer pour atteindre 5000 habitants au XIVème siècle.

Ce "petit Cordes" comme d'aucuns le surnomment, inscrit parmi les "plus beaux villages de France", offre au visiteur ses restes de remparts percés par la porte de la Caussade, ses rues caladées, ses maisons médiévales, sa place à couverts, et sa collégiale Saint-Rémy (fin XIVème)...

Lautrec : le moulin

Construit à proximité du point le plus élevé du village, le dernier moulin du secteur a été restauré en 1997 par un compagnon-charpentier local, et moud toujours de la farine lors de certains évènements. On en a retrouvé trace en 1397, fut rebâti en 1688 et a cessé de fonctionner en 1830.

Son toit entier pivote afin de positionner ses ailes dans l'axe du vent. Et quel vent !... Le principal vent de la région est le vent d'autan qui souffle sur le Languedoc et le Midi-Toulousain. Sec et chaud, en provenance su sud-est, il souffle à une vitesse moyenne de 40 km/h, avec des rafales dépassant les 100 km/h. Son surnom de "vent des fous" est particulièrement éloquent...

Lautrec : la campagne

Lautrec est situé au centre d'une vaste zone agricole qui s'étend jusqu'aux contreforts des Monts de Lacaune et de la Montagne Noire. Zone de polyculture et d'élevage, la campagne propose au fil des saisons une belle mosaïque de couleurs.

Toutefois, la culture reine du secteur, est celle de l'ail rose, plus que millénaire. Seul ail français à bénéficier du "label rouge" (depuis 1966), il est récolté fin juin par quelques 380 producteurs qui en commercialisent annuellement 4000 tonnes...

Graulhet : le Dadou

Après le Tarn et l'Agout, le Dadou (116 km) est la troisième rivière du département qui l'entaille en son centre de l'est vers l'ouest. Elle partage le Tarn pratiquement en son milieu, et joue un rôle stratégique depuis 1317 car elle séparait les diocèses d'Albi et de Castres qui ont pris des orientations bien différentes. Ce cours d'eau a eu plus tard une importance capitale pour l'installation de l'industrie du cuir dans sa vallée, car grande consommatrice d'eau.

Il coule ici sous le pont vieux de Graulhet (12 000 habitants), ouvrage construit en 1244 et classé monument historique. La ville s'est installée entre la rivière, un îlot rocheux et des marécages qui seraient à l'origine de son nom. Graulhet proviendrait en effet de l'occitan "granolha", autrement dit "grenouille"...

(à noter qu'en occitan l'association de lettres "lh" se prononce comme "ill", tout comme "nh" est l'équivalent de "gn").

Graulhet : l'hostellerie

Cité à dominante industrielle, Graulhet possède toutefois un centre médiéval remarquable avec son quartier de Panessac, dont le fleuron est sans conteste l'Hostellerie du Lion d'Or, dont on voit ici la cour intérieure comportant trois niveaux de galeries. Henri de Navarre, futur Henri IV, y aurait fait une halte gastronomique.

Classée à l'inventaire des monuments historiques, elle est l'une des plus vieilles bâtisses à pans de bois de chêne du Midi de la France : les grosses poutres de sa cave, présentant une section d'un mètre, ont été répertoriées scientifiquement comme plus que millénaires ! D'importants travaux de rénovation sont en cours...

Graulhet : la mégisserie

Pendant plusieurs siècles, Graulhet a été le plus grand centre français de mégisserie, qui a pour but de transformer les peaux brutes en cuirs imputrescibles . Dès le Xème siècle sa réputation était étendue en raison de l'utilisation d'un tanin spécial : l'écorce de chêne. Le travail des peaux nécessite une consommation d'eau importante, aussi les usines se sont implantées le long du Dadou. Autrefois, 6 mois s'avéraient nécessaires pour obtenir un cuir prêt à être utilisé par les maroquiniers qui vont ensuite le façonner.

Pour obtenir un produit fini, la peau doit passer par plus de 60 étapes au cours desquelles elle sera délainée, nettoyée, assouplie, tannée, teintée, essorée, étirée, aplanie, refendue, pigmentée, retaillée, mesurée, classée...

Aménagée dans une ancienne usine en bordure de rivière, la "Maison des métiers du cuir" retrace le savoir-faire qui a fait mondialement la renommée de la ville...

 
 
 

 

 

 

Graulhet : la médiathèque

 

Cette industrie du cuir a subi plusieurs crises, dues notamment à la concurrence asiatique, et n'est plus aujourd'hui que confidentielle. Il en reste par contre de nombreuses vastes usines, souvent polluées par les produits chimiques utilisés, et dégradées par des années d'abandon.

 La réhabilitation de ces friches industrielles, très nombreuses dans notre département (comme à Carmaux, Mazamet, Castres, Graulhet,...) est un véritable défi pour les pouvoirs publics. La médiathèque de Graulhet, implantée dans une ancienne mégisserie, est un bel exemple de restauration réussie. Mais à quel prix ?...

La Voie Verte

En remontant le Dadou, nous rencontrons la Voie Verte reliant Albi à Castres, et baptisée Chemin des Droits de l'Homme, qui louvoie au coeur de la campagne tarnaise. Très présents dans le paysage tarnais, les pins parasols étaient jadis synonyme d'accueil pour les huguenots.

Cette voie verte longue de 46 km a été aménagée sur l'ancienne ligne de chemin de fer qui reliait Castelnaudary à Rodez de 1869 à 1970... Le département compte plus de 4500 km de sentiers inscrits au plan départemental des itinéraires de randonnée, dont 500 km de GR (GR 7, GR 36, GR 46, GR 653 ou Voie d'Arles).

Le "petit train"

D'ailleurs, de nombreux chemins de fer "d'intérêt local" desservaient le Tarn au début du XXème siècle. Ils sont nés avec la révolution industrielle à la fin du XIXème s et ont périclité à l'approche de la deuxième guerre mondiale. Ainsi, par exemple, pour sortir Graulhet et ses industries du cuir de l'isolement, une voie étroite de tramways à vapeur est mise en place en 1895.

Pour effectuer le trajet de 46 km entre Saint-Sulpice et Laboutarié il fallait compter 2 h 30 ! Pourtant, ce tortillard connut une intense activité tant au niveau des passagers que des marchandises (charbon, peaux, denrées,...). Mais la concurrence de la route lui fut fatale en 1937...

Moulin des Plégats

Le Tarn étant parcouru par de multiples cours d'eau, de nombreux moulins furent construits sur leurs berges. Les premiers moulins à eau de la vallée du Dadou apparurent au XIIème siècle, dont une dizaine était encore en activité en 1950. La photo représente la salle des meules du moulin des Plégats, sur l'Assou, petit affluent du Dadou. Il appartient à la même famille depuis plus de trois siècles.

Un rouet actionné par l'eau amenée par un bief était relié directement à la meule courante qui tournait horizontalement contre la gisante, meule fixe. Toutes deux étaient enfermées dans une caisse en bois (magnifiquement cirée) qui supportait la trémie, réservoir à céréales, au mécanisme en forme de tête de cheval...

Réalmont

Toujours dans la vallée du Dadou, la ville de Réalmont ("Mont Royal" - 3179 habitants) marque la limite entre la plaine et les Monts de Lacaune. Elle a été fondée en 1272 sous Philippe le Hardi, roi de France, qui souhaitait accroître son autorité dans une zone accueillant de nombreux hérétiques, et où les seigneurs locaux étaient très puissants.

Présentant l'organisation typique d'une bastide, ses rues perpendiculaires convergent vers la place centrale et ses couverts, dominés par l'église construite en 1628. C'est la cité de naissance de Louisa Paulin, un des plus grands poètes contemporains de la langue d'oc, et le siège d'un grand marché hebdomadaire rassemblant tous les petits producteurs du canton...

Lafenasse : lavoir

Ils sont apparus en grand nombre à partir du XVIIIème siècle, pour cesser progressivement leur activité quelques 200 ans plus tard : les lavoirs, qui ont eu une place importante au niveau de l'hygiène mais aussi un rôle social. Il en existe de formes et de conceptions diverses, réalisés avec des matériaux variés suivant les régions. Voici celui de Saint-Lieux Lafenasse, construit à même le lit du Dadou.

Le linge était en général mis à tremper dans la cendre de certains bois, avant d'être transporté sur une brouette au lavoir. Le linge était alors frappé au battoir pour en extraire la saleté, savonné (avec un savon "maison", sinon le fameux savon de Marseille existe depuis le moyen-âge !), abondamment rincé dans l'eau du bassin ou de la rivière, essoré, puis à nouveau savonné et frappé sur les margelles inclinées. Cette besogne éreintante avait son apogée 2 fois l'an lors des grandes lessives, qui voyaient le linge étendu sur l'herbe ou les buissons avoisinants...

La Roque : ruines du château

La commune de Montredon-Labessonnié, particulièrement étendue et au relief tourmenté, possédait au moyen-âge un château principal défendu par huit autres forteresses plus modestes disposées sur les frontières de la baronnie. C'est le cas du château de La Roque, implanté dans la vallée encaissée du Dadou.

Le suzerain avait divisé son territoire en fiefs, confiés à des vassaux commandant chacun l'une des vallées conduisant au plateau montredonnais. Les tours, véritables sentinelles avancées, communiquaient entre elles. Malgré cette organisation, les routiers anglais réussirent à investir ces maisons fortes, leur servant de base de repli après le pillage des bourgs de la plaine...

Arifat

Ce secteur du haut-Dadou annonce la transition entre Pays de Cocagne, Vallée du Tarn et Monts de Lacaune : les plateaux verdoyants, à partir de 500 m d'altitude, succèdent ainsi à la plaine.

C'est sur un petit affluent, le ruisseau des Bardes, que se trouvent les cascades d'Arifat, nom d'origine gauloise signifiant "ruisseau des fées". Cette succession de trois chutes étagées sont à l'aplomb de l'ancien château que les catholiques avaient brûlé en 1574 afin qu'il ne tombe pas entre les mains des protestants !

Ces cascades, baptisées localement "lous bouillous" (les bouillons), sont incontestablement les plus belles du département. Constituées de trois chutes successives cumulant une hauteur de 81 mètres, séparées les unes des autres par vasques ou biefs, elles entaillent profondément une falaise granitique tapissée de veines de quartz. Un très joli site dominant le lit du Dadou...

Razisse : Grandval

Dans les années 50, de nombreuses retenues ont barré la majorité des cours d'eau tarnais pour la production d'hydroélectricité ou pour l'alimentation en eau potable et le maintien de l'étiage des rivières pendant la saison sèche. C'est ce deuxième motif qui a conduit à la construction du barrage de Razisse sur le Dadou. Sa mise en eau en 1954 a noyé les ruines du château de Grandval.

Construit au milieu du XVème siècle à la demande des vicomtes locaux, il fut embelli au XVIIème siècle avant d'accueillir en 1900 une branche de la famille du peintre Toulouse-Lautrec. En juin 1944, il fut le siège de la résistance locale et à ce titre fut incendié par les Allemands. Les eaux ont ensuite englouti les parterres du parc et les terrasses ornées de statues, alors que la végétation prenait possession de la bâtisse, aux pièces jadis si richement décorées...

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