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Saint-Véran, où les coqs picorent les étoiles... 

Ce village de 270 habitants a été longtemps isolé au bout du monde, et ses habitants ont dû s'adapter aux contraintes de la vie en haute montagne. Ce n'est qu'en 1900 que tous les hameaux du secteur ont été reliés par la route.

En accédant à Saint-Véran, la route longe une très belle "demoiselle coiffée" (cheminée de fée) isolée : une colonne de roche tendre modelée par les eaux de ruissellement est surmontée par un bloc de pierre plus dure lui servant de chapeau.

Saint-Véran, "plus beau village de France" qui s'étage entre 1982 m et 2042 mètres d'altitude, est souvent décrite comme "la commune la plus haute d'Europe" mais il semblerait que ce ne soit pas véritablement le cas ! Des dictons locaux affirment que cette localité constitue "la plus haute montagne où il se mange du pain" ou que c'est "la plus haute terre d'Europe où les coqs picorent les étoiles" !...

Le village de Saint-Véran est construit sur les pentes de la montagne de Beauregard, exposées au sud-ouest. C'est sur ce versant, autrefois irrigué par des canaux, que se concentrent les activités agricoles (fourrage, céréales, potagers) avec au-dessus les pâturages qui accueillent la transhumance en été.

En face, à l'ubac, les pentes sont couvertes de forêts et dominées par des corniches et des éboulis où l'habitat n'est pas possible. Les crêtes culminent à 3000 m d'altidude, et la végétation y pousse jusqu'à 2500 m. Tout le secteur est intégré dans le Parc Naturel Régional du Queyras, créé en 1977 et regroupant 11 communes.

Saint-Véran bénéficie d'un climat méditerranéen privilégié, avec un temps sec et ensoleillé. Le ciel y est donc souvent limpide, et cette sécheresse augmente les contrastes de températures liés à l'altitude.

Le village est divisé en cinq quartiers et compte également deux hameaux excentrés ; il conserve ses activités traditionnelles (élevage et artisanat) et développe des activités touristiques estivales et hivernales. Aligné sur une pente couverte de prairies d'alpage, sur une longueur d'un kilomètre, le bourg domine le lit de l'Aigue Blanche.

Les typiques maisons de Saint-Véran sont orientées plein sud, et bâties de façon à s'adapter aux conditions et modes de vie. Le rez de chaussée est construit en mur de pierres très épais, 50 à 70 cm en général.

On y accède par une porte en bois à double battants. C'est à ce niveau que se trouve notamment l'étable où vivaient ensemble bêtes et gens (pour profiter de la chaleur animale) : les animaux au fond de la pièce, alors que table et lit sont à proximité de la fenêtre.

La partie supérieure est appelée fuste : elle est constituée de troncs d'arbres empilés et croisés aux angles. La toiture est composée de bardeaux en mélèze, bois connu pour être imputrescible.

On stockait le foin pour l'hiver à l'intérieur de la fuste, alors que les balcons étaient utilisés pour achever la maturation des récoltes. En effet, en raison de la neige, les travaux des champs s'étalaient sur une courte période et les récoltes s'effectuaient souvent avant terme.

A côté de la ferme principale, on trouve un bâtiment plus petit, le caset, construit en pierre et couvert de lourdes lauzes : il peut abriter les réserves de nourriture, des chambres ou des débarras ; c'est là également que l'on entreposait les biens personnels pour les protéger des incendies.

On trouve une fontaine dans chaque quartier. Alimentées par une petite source, elles se composent de deux parties construites en bois de mélèze.

L'eau arrive dans la partie circulaire, la "tino", où les habitants venaient se ravitailler et qui servait également d'abreuvoir pour les troupeaux. La partie rectangulaire, le "batchas", était quant à elle utilisée pour effectuer la lessive.

Chaque quartier possédait également son four dans lequel chaque famille effectuait une fournée par mois suivant un ordre déterminé par tirage au sort. Fin novembre, 2 ou 3 cuissons successives fournissaient le pain pour tout l'hiver ; il était conservé au domicile dans la chambre à pain. Ces miches étaient surtout réalisées avec du seigle, qui pousse mieux en altitude, et qui sèche sans moisir.

Les maisons étant construites essentiellement avec du bois, l'incendie constituait le plus grand risque redouté des habitants. En 1516, tout le village a entièrement brûlé ; il a donc été reconstruit par quartiers en ménageant des espaces coupe-feu. Une pompe à incendie a été achetée en 1874 et utilisée jusqu'en 1967.

Une mine de cuivre fut exploitée dans les environs du village à partir de 2000 ans avant JC à ciel ouvert. Au début du XXème siècle des galeries ont été creusées, mais leur exploitation était rendue délicate par le gel. Le minerai extrait était évacué par camions puis par train, jusqu'en 1940.

Le village de Saint-Véran compte 24 cadrans solaires (le département des Hautes-Alpes est l'un des plus riches dans ce domaine) peints sur les murs. Ils se sont développés de la Renaissance au XIXème siècle, symbolisant la situation sociale du propriétaire, favorisés par la proximité avec les artistes italiens spécialisés.

L'église actuelle date du XVIIème siècle, l'une des précédentes ayant brûlé en 1516, une autre détruite pendant les guerres de religion. On retrouve toutefois des pierres sculptées leur ayant appartenu (bénitier, colonnes, chapiteaux).

Le porche est orné par des lions à la signification incertaine : influence lombarde ? référence à Saint-Marc ?... Les statues, bas-reliefs, chemin de croix ou santons en bois de la crèche sont tous l'oeuvre des habitants de la localité.

Le village comporte également 6 croix de missions, réalisées lors de chaque venue dans le village d'un missionnaire pour évangéliser ses habitants. Chacun des élements qui la décorent (marteau, coq, épée, clous, tenaille,...) font référence à la Passion du Christ.

Autrefois, les hommes du village profitaient de la longueur de l'hiver pour s'adonner à la menuiserie et à la sculpture sur bois. A partir de troncs de mélèze qu'ils avaient eux-mêmes abattus et façonnés, ils réalisaient meubles et objets utiles à leur famille ou à la communauté villageaoise. Ces éléments étaient souvent décorés de rosaces ou motifs divers.

La plus vieille maison de Saint-Véran, construite en 1641, abrite un musée, le Soum, destiné à conserver et transmettre la mémoire de ce village montagnard si typé. Les pièces ont été reconstituées à l'identique, et regorgent de meubles ou objets utilisés jadis.




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