Peyriac de Mer est un village de 828 habitants implanté sur les rives de l'étang de Bages-Sigean, au sud de Narbonne. Depuis l'Antiquité, son économie est tournée vers la pêche et la récolte du sel, auxquelles s'est rajoutée plus tard la viticulture...
En quittant le parc de stationnement principal situé entre le bourg et les salins, le sentier passe à proximité d'une oeuvre composée d'anciennes machines agricoles, et constituant un monument en l'honneur de la viticulture languedocienne...
C'est par un cheminement sur des passerelles en bois aménagées par la municipalité dans le cadre du projet du Parc Régional Naturel de la Narbonnaise créé en 2003 que va débuter le parcours...
Ces pontons ont été érigés sur les anciens salins du village, qui ont fonctionné depuis l'Antiquité et jusqu'en 1967. Dés le départ, le regard est attiré au sud-est par la pointe du Mour (60 mètres d'altitude), qui se trouve sur le circuit à parcourir...
La passerelle obliquant à angle droit, on découvre alors en direction du nord-est la colline du Roc de Berrière (culminant à 74 mètres), qui marquera quasiment la fin de la boucle. Cet aménagement a été rendu possible par le Conservatoire du Littoral qui a acheté ces salines en 1981, afin d'éviter un projet d'urbanisation qui aurait irrémédiablement détruit ce site...
Le chemin de planches sur pilotis s'interrompt, et la balade se poursuit sur un "passadou", digue limitant les différents bassins. On n'a aucun mal à imaginer le dur travail des sauniers : la récolte du sel au rateau, son transport dans une "banaste" posée sur la tête,...
Parfois un petit canal court entre deux salines, et il reste les vestiges d'un système de vannes qui permettaient de réguler la hauteur de l'eau dans le marais salant... Quelques foulques parcourent la mousse qui recouvre la surface de cette eau stagnante...
Revenus sur "la terre ferme", le circuit longe le solide mur qui enfermait les salines. Pendant des siècles le sel avait une grande valeur, car il constituait le seul moyen de conserver les aliments (salaisons, séchage des poissons) et était indispensable à l'alimentation du bétail...
Accolée au mur de clôture, se dresse une ancienne cabane : c'était la guérite du douanier qui était chargé de contrôler la récolte du sel. Faisant l'objet d'un monopole royal, le sel était soumis à impôt (la gabelle), et fut à l'origine de contrebande et de soulèvements populaires...
Les anciens quais d'embarquement du sel ont été également intégrés dans le parcours. Tous ces aménagements (maintenant obsolètes) que l'on découvre chemin faisant montrent l'importance autrefois revêtue par ce produit naturel...
C'est par un nouveau cheminement sur pilotis que va être contournée une zone rocheuse qui s'avance dans la saline, et qui aurait très bien pu être traversée à pied. Mais tout ce secteur a été laissé à l'état sauvage afin de favoriser la nidification des oiseaux. Canards, avocettes, sternes, gravelots et flamants roses trouvent dans ces eaux une nourriture abondante...
Ce tableau représente la saline de Peyriac en 1900 ; elle fut exploitée depuis la plus haute Antiquité. D'ailleurs, dans l'ancienne colonie romaine de la Narbonnaise, les soldats romains recevaient une partie de leur solde en sel : le "salarium" (qui a donné naissance au mot "salaire"...). Ces salins connurent leur apogée au milieu du XVIème siècle.
Arrivé en haut d'une petite butte (21 mètres d'altitude tout de même !!!), le panorama s'élargit vers le sud : dernier bassin du marais salant et petite anse de l'étang de Bages-Sigean miroitant sous le soleil à contre-jour, avec en toile de fond les collines des Corbières, secteur de La Palme...
En se retournant vers l'ouest, on aperçoit une partie de la saline de Peyriac que l'on vient de parcourir, avec notamment au premier plan la zone interdite aux humains pour que les oiseaux (sternes, gravelots, goélands,...) puissent s'y reproduire en toute tranquillité...
Nous avons dorénavant quitté le domaine des salins (même s'ils ne sont pas bien loin) pour arpenter un nouveau domaine naturel très caractéristique de cette région : la garrigue ! Avec les premiers arbustes en fleurs (genêts, cistes, romarins,...), vue et odorat sont agréablement sollicités...
Et puis enfin, en basculant de l'autre côté de la butte, on domine enfin celui qui est le thème central de notre balade du jour, et dont je vous donnerai davantage de détails le concernant (et faute d'être croustillants ils n'en seront pas moins originaux !!!) lors du prochain article : l'étang du Doul...
Après être redescendu de ce monticule, avoir traversé un bois de conifères riche de nombreuses espèces variées, longé à nouveau la saline, nous partons à l'assaut du Mour par des sentiers ravinés. Cette colline entièrement couverte de garrigue garde la trace d'anciennes vignes...
Du haut de ses 60 mètres d'altitude, un magnifique panorama à 360° s'offre à nous. L'occasion de visualiser le chemin parcouru depuis le départ de Peyriac, de mieux comprendre l'inter-dépendance des différents milieux, et de repérer l'itinéraire du retour...
C'est surtout d'ici que nous avons la meilleure vue sur l'étang du Doul : quasi circulaire, on dirait qu'il occupe le cratère d'un volcan ! Mais il n'en est rien... 800 mètres de diamètre, une surface de 182 hectares, d'une profondeur maximale de 3,60 m, classé Natura 2000,...
Mais ce qui en fait sa spécificité, c'est sa salinité ! Aux environs de 60 g/l (soit 2 à 3 fois la salinité de la mer), cette "hyperhalinité" est comparable à celle de la Mer Morte ! L'étang du Doul est réputé comme l'unique lagune hyperhaline permanente du littoral méditerranéen...
Avant de redescendre vers le Doul, un coup d'oeil particulièrement original vers l'est, avec une succession d'étangs séparés par d'étroites bandes de terre : l'île de Planasse au milieu de l'étang de Bages, l'étang de la Sèche, la ligne de chemin de fer accolée au canal de la Robine (z'avez vu le train ???), l'étang de l'Ayrolle et au fond, la Méditerranée...
Afin de profiter du joli belvédère que constitue la colline du Mour, un coup de zoom plein sud sur les installations de Port La Nouvelle (4859 habitants) qui s'est développée dans les années 60 autour de son port et de sa gare : silos à céréales, dépôts pétroliers, stockage de gaz et d'alcools, cimenteries Lafarge, salins du Midi,...
Après avoir profité de ce magnifique panorama (il est rare en bordure d'étangs d'avoir des points surélevés accessibles pour bien visualiser la structure du paysage), il est temps maintenant de redescendre à travers la garrigue pour rejoindre les rives calmes de l'étang de Bages que colonisent plusieurs groupes de flamants...
Cap maintenant sur la petite plage gravillonneuse de l'étang du Doul, très recherchée en saison par tous ceux qui souhaitent lire leur quotidien favori en faisant la planche sur ses eaux, à l'image d'une célèbre photo caractéristique de la Mer Morte...
C'est en suivant ses berges côté nord que va s'effectuer le retour vers le village. La rare végétation qui se développe sur ces versants arides illustre bien la présence régulière et la force des vents (300 jours par an en moyenne) qui balayent cette côte : cers, tramontane, marin, grec, vent d'Espagne, brises, etc...
Cette présence quasi-quotidienne du vent ajoutée aux gerbes d'eau salée qu'il soulève a sculpté les rochers qui imposent à la sente un parcours aussi tourmenté que leur érosion propre...
Les rebords adoucis de la colline du Roc de Berrière abritent quelques vignes, qui reste pratiquement la seule activité agricole possible dans cette région aride. Les vins produits appartiennent aux Corbières ; leur diversité est en lien direct avec la variété des terrains...
La volonté des responsables du Parc Naturel de la Narbonnaise est de lutter contre le confinement du Doul, en rétablissant les échanges entre lui, les salines et l'étang de Bages-Sigean : curage des chenaux, réhabilitation des vannes, maintien de l'état d'hyperhalinité...
Si la visibilité dans les eaux du Doul n'excède parfois pas 5 cm, il n'en est pas de même dans les anciens bassins des salines, dans lesquels l'eau n'est pas très profonde, et où se développent des macroalgues et de nombreux herbiers de ruppiacées ou autres algues vertes...
Il n'est que temps de terminer cette agréable balade qui a permis de côtoyer de nombreux milieux méditerranéens. Digues, pontons de bois, sentiers côtiers : le choix de l'itinéraire du retour est modulable, et laissé aux envies de chacun...